2018 Les assemblées

Je vais partir

 

 

Plus de 35000 jours ici-bas.

Que reste-t-il de ces moments passés ici sur cette terre.

La chanson du poète est souvent présent, il y a le fauteuil et le lit. Ces journées qui passent.

La télévision qui diffusait ces émissions quotidiennement que l’on regarde sans vraiment la regarder entre quelques courtes siestes.

Il y a les assemblées.

Aujourd’hui la vie ressemble à la chanson du grand Jacques. Du lit au fauteuil, en passant à la table de la cuisine pour les repas apportés.

La journée est ponctuée par la visite à des heures précises des aides à domicile.

Il faut de l’aide pour se lever, pour se laver, pour s’habiller, les repas, pour organiser le quotidien et payer les factures.

Mais, elle reste dans sa maison, aménagée depuis peu pour s’adapter à son âge, pour ne pas être absorbé par ces structures si souvent inhumaine qui finissent par devenir des mouroirs.

Cette maison aurait tant à dire, s’il elle pouvait. Tant de moments dans cette demeure, tant de passages, des rires de repas entre amis.

Elle est sa mémoire, car la sienne n’est plus vraiment fiable.

Mais il y a les assemblées.

Bien sûr qu’elle sait encore qui elle est, elle reconnaît les rares personnes qui viennent la voir.

Mais forcément, il y a des trous quand le passé revient dans les discussions.

Il faut l’aider, poser les dates et les noms des personnes pour que s’ouvre la boite à souvenir. Et d’un coup les mots arrivent et nous projette dans sa vie, dans le passé.

Pas besoin de fermer les yeux pour vivre en son temps dans une époque proche et lointain à la fois.

Tant de changement en ces années du dernier siècle.

Il faut sortir de la structure des phrases, oublier les mots pour plonger, voir et ressenti les émotions.

Comprendre aussi.

Voir avec ses yeux, oubliez nos repères pour savourer cette plongée dans son passé.

Les odeurs sont différentes.

Le rythme plus lent.

Le confort moins présent.

La vie plus dure mais toujours prise à bras le corps, sans se plaindre, sans jalouser les voisins.

On perçoit au fil des phrases l’ambiance, la météo y semble aussi plus influente ou du moins plus spécifique.

Les détails sont nombreux, les yeux pétillants aux souvenirs plus intimes, plus doux.

Surtout pour les assemblées.

Elle se rappelle des plats qu’elle préparait pour des visites improvisées, des verres de ce vin doux qui se vident au milieu des rires.

Cette terre qui apportait la nourriture après de durs efforts.

Les conserves qu’elle faisait en fin d’été.

Toute cette vie défile avec ses mots, avec parfois au creux des yeux une larme qui perle.

Cet amour qui revient à la surface, cet homme qui a reçu tant de baisers, tant d’affection qui partageait ces nuits douces et sereines.

Cet homme, après une belle longue vie honnête et sans prétention parti pour d’autres cieux.

Mais, elle n’aime pas s’apitoyer sur cette vie de veuve, elle sait accepter ce chemin terrestre, même si aujourd’hui elle ne comprend pas toujours cette attente. Cette vie qu’elle trouve maintenant inutile.

Il reste les assemblées.

 

 

 

 

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