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2018 Je vais partir

Je vais partir

Je vais partir pour mon voyage, loin de vous, loin de tous, loin de cette région.Poemes et textes

Je vais partir, de cette ville, abandonner ici cette maison.

J’ai fait le tri dans mes affaires.

J’ai commencé par le grenier.

J’ai descendu tout ce qui ne me servait pas.

Tout ce qui me rattachait à mon passé, mes anciens jouets, des photos de communions, de fêtes de famille, quelques souvenirs aussi. Les méchants comme les bienveillants.

Je vais partir sans vous laisser cette malle ancienne, ce mange-disque et ces bouts de jouets de mon enfance cassée.

Je laisse aux limbes cette marche sinistre, cette poignée de terre jetée et ce baiser froid. J’aurais tant aimé écouter la conversation de l’ange mais seul le tourment fut là pour s’engager à mes côtés pour tant de décennies.

Enlevée la balançoire anciennement accrochée aux branches. Elle qui savait si bien rythmer mes rêves.

Je vais partir avec la douceur des feuilles sifflant au vent et boire le parfum de cette terre qui se mélangeait à mes doigts.

J’ai juste, au pied du chêne, enterré ces mots d’amour que je n’ai pas entendu.

Semé au gré du vent ceux que j’ai prononcés tout bas au creux de vos oreilles. Du temps où vos nuits étaient miennes, où vos peurs et vos joies m’étaient destinées.

J’ai remonté de ma cave toutes mes peurs anciennes, tout ce passé qui en un jour explosa.

Cette marche où j’ai tant contemplé l’Homme vivre cette vie que je ne savais ressentir.

Ces murs qui prenaient les coups de ma tête.

Il n’y a plus, soyez sans crainte, ces diables qui volèrent mon innocence, mon sourire et mon insouciance.

Peut-être encore cette odeur de peur, de larmes salées et suspendues dans l’air ces quelques notes de Fauré.

Avant de partir pour cet univers mystérieux, j’ai bien pensé à trier ces papiers, ceux qui nous résument par des numéros, des statistiques et de savants intitulés.

Toutes les photos ont été brûlées, elles ne valent rien si elles ne sont pas attachées à mes souvenirs. Ces moments que je n’ai jamais vraiment su apprécier, ceux qui m’ont isolé, loin de vous, si loin de vos sourires.

Au fond de ces cartons vous ne trouverez pas beaucoup de réponses. Désolé, je ne comprends toujours pas le pourquoi de ces visages, de ces sourires, de ces pleurs et de cette futilité d’un si futile chemin.

En ces longues années je n’ai jamais su appartenir à ces poussières d’atomes de ce vaste univers qui avec une conscience se croient supérieures aux forces les entourant. Toujours décalé de ces choix sociétaux, décalé d’une vie simple sans réflexion.

Perdus sous les lattes du plancher, mon regret de ne pas être né imbécile heureux, il a fallu que je sois capable de voir ma misère, mon malheur et mon impuissance.

Mes regrets et mes remords je les laisse s’envoler loin de votre futur.

Avant de partir, j’ai pris soin de tout nettoyer, de limiter les déchets.

Avant de partir, j’ai pris le temps de susurrer aux fleurs un message pour vous. Combien le manque de vous est immense, combien il brûle mon énergie, chasse à jamais mon sourire, m’empêche d’être un vieillard.

Combien j’aurais tant aimé savoir vous aimer à vous construire et non à vous détruire, être présent et non si distant.

Etre un repère et non une bouteille perdue au milieu de l’océan de ma fragilité, de mes doutes, de mes craintes et de cette foutue question.

 

 

 

 

 

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